Le fil rouge d'une longue vie

Germaine LacorreVingt-huit ans que Germaine Lacorre a quitté Bayard. A la demande si amicalement formulée par Michel Cuperly, d’une interview pour Chapô, elle lui avait spontanément donné son accord. Cependant, lors de ma visite pour un premier entretien, elle s’est montrée réticente. La page de Notre Temps est tournée depuis si longtemps ! D’autant plus que Bayard, pour elle, c’est seulement 14 ans, il y a beaucoup plus de choses dans sa vie « avant…et après Bayard ! » Mais notre complicité s’est très vite installée lorsqu’elle a évoqué les débuts de son aventure humaine par la rencontre de la JOCF. Pour moi ce fut la JACF…J’ai toujours considéré ces Mouvements de Jeunesse d’une époque révolue comme une « Université populaire » qui a donné leur chance à des milliers de jeunes qui n’étaient pas forcément nés du bon côté de la barrière sociale, et qui sont devenus des responsables dans la société et dans l’Eglise. L’enthousiasme ayant très vite repris le dessus, le fil rouge de sa longue vie s’est déroulé sans hésitation.

 

Où avez-vous rencontré la JOCF ?

En 1941, nous étions en pleine guerre, et après « la débâcle » les grandes banques de Paris se sont repliées dans le Puy de Dôme. Dans la région on recrutait du personnel féminin pour aller travailler dans ces banques. Originaire de la Haute-Vienne, j’avais donc eu la possibilité de postuler pour ce qui était pour moi un premier emploi. Et je me suis retrouvée à La Bourboule dans une banque du Crédit Lyonnais qui occupait un grand hôtel de la ville

C’est là, dans un couloir de cette banque improvisée, qu’une jeune de ma génération (j’avais 20 ans) m’a remis une invitation pour participer à une « Assemblée Générale » de la JOCF. J’ai gardé un souvenir très précis de cet instant et de cette modeste invitation manuscrite et maladroitement illustrée. Pour le reste je me souviens seulement d’une joyeuse assemblée d’une cinquantaine de filles, réunies dans une salle paroissiale. J’avais déjà entendu parler de la JOCF. Mais c’est là où j’ai reçu ma première initiation. Une semaine plus tard, je me rendais à ma première réunion « d’équipe ». Nous étions une dizaine de filles, avec un aumônier, un texte d’évangile sous les yeux, une piste de réflexion appelée « Campagne d’Année », et notre vie quotidienne au travail, qui me paraissait si banale, prise là au sérieux. En sortant de cette réunion j’étais habitée au plus profond de moi par quelque chose de très nouveau. L’Action Catholique était entrée dans ma vie et allait la changer du tout au tout.

À la tribune de nos rencontres d'Autrans. 

À la tribune de nos rencontres d'Autrans. 

 

Si je vous comprends bien vous avez eu le coup de foudre qui semble n’avoir rien perdu de sa force presque soixante dix ans après ?

Tout à fait. Et avec le recul je prends conscience que j’ai reçu là ce qui devait être le plus essentiel pour mon existence : la découverte de Jésus Christ à travers l’Evangile ; la découverte de l’attention à la vie dans laquelle résonnait cet Evangile par la réflexion et la prière. Ensemble, dans le partage, l’observation, la réflexion, ce qui aurait pu rester un fait insignifiant prenait consistance. Et ceci dans un climat d’amitié très chaleureux. Cette expérience d’une grande fraternité entre jeunes a inscrit en moi des attitudes qui ont marqué ma vie.

Ce fut pour vous une rencontre fondatrice…

Vous ne croyez pas si bien dire. Les banques étant rentrées à Paris, je suis moi-même rentrée à Limoges avec la perspective de trouver un nouveau travail. Finalement c’est la vie militante à plein temps qui m’attendait, avec des responsabilités à la Fédération jociste et un peu plus tard à la Fédération Ames Vaillantes où j’avais en charge les Ames Vaillantes Préjoc. Ce fut une étape au cours de laquelle j’ai découvert à quel point ces Mouvements d’Eglise étaient aussi des lieux de culture. Car il fallait s’informer, lire, travailler, réfléchir avec d’autres, préparer des interventions, prendre des contacts avec des responsables dans des secteurs divers aussi bien de la société que de l’Eglise. Les veillées de prière et les récollections faisaient partie de la vie des Mouvements de jeunes. Le petit livre de l’Abbé Godin, « Le levain dans la pâte » était notre livre de chevet. C’était le temps d’un travail collectif où nous étions portées par des convictions partagées, vécues en Eglise. Dans ce contexte d’un travail en équipe, chaque personnalité prenait sa dimension.

Aussi passionnante qu’a dû être votre vie pendant ces années-là, être jeune n’a qu’un temps, et un jour il a bien fallu que vous quittiez ces responsabilités parmi les jeunes, comment êtes-vous passée à une autre étape ?

La Providence veillait…Le fil rouge de l’Action Catholique ne s’est pas rompu…Dans les années 1950, un Mouvement apostolique de femmes, qui s’appelait alors « La Ligue Féminine d’Action Catholique », cherchait comment introduire une nouvelle dynamique d’Eglise dans ce Mouvement à partir de l’expérience réussie de l’Action Catholique des jeunes. A la tête de ce Mouvement, il y avait une femme exceptionnelle, Marie du Rostu, qui avait quelque chose d’un génie créateur. Avec une équipe, et un aumônier national, le Père Raymond Bissonnier, un vaste programme de formation a été imaginé, appelé « Ecole Missionnaire », où étaient invitées en priorité les jeunes femmes autour de la trentaine, qui avaient milité dans l’Action Catholique des jeunes,

Ces Ecoles Missionnaires duraient 15 jours. L’une d’elle se déroulait à Royat, dans le Puy de Dôme. J’y fus envoyée en tant qu’ancienne jociste, avec une ancienne jaciste de la Creuse. Nous étions une cinquantaine, toutes générations confondues. Très vite je me suis retrouvée dans mon bain…Au bout du 3ème jour les animatrices, venues de Paris, m’ont associée à leur réflexion. Plusieurs fois elles m’ont demandé d’intervenir pour apporter un témoignage en lien avec le sujet du jour. C’était une formation à la vie missionnaire à la fois théologique, ecclésiale, pastorale. C‘est là que j’ai appris à faire une « étude de terrain », où on nous faisait explorer toutes les composantes humaines, sociologiques, sociales, professionnelles des différents quartiers d’une paroisse, d’une ville. C’était un peu la vulgarisation des études rurales du Père Boulard. Pour annoncer l’Evangile, y compris dans une paroisse, il était nécessaire de connaître les lieux de vie, les habitudes de vie, les métiers, les conditions d’existence des habitants dans leur diversité.

En quittant cette session, je quittais de nouvelles amies, les responsables nationales de l’Action Catholique Générale Féminine. Elles ne devaient plus me lâcher…Je fus appelée à monter à Paris participer à des réunions, collaborer aux revues militantes du Mouvement, apporter un témoignage lors de Journées Nationales… Et pour finir, en avril 1955, j’ai reçu une lettre de Melle du Rostu me demandant de rejoindre l’équipe nationale, dans le cadre d’une Commission Urbaine. Je suis arrivée à Paris le 1er septembre 1955 et n’en suis plus repartie…

Vous avez pris le risque de quitter votre enracinement humain, familial et apostolique pour rejoindre une équipe nationale, à Paris, dans un total dépaysement. Comment l’avez-vous vécu ?

Je savais quand même où je mettais les pieds…Depuis plusieurs années j’avais eu l’occasion de collaborer avec cette Commission Urbaine au sein de laquelle j’allais travailler. Bien qu’ayant reçu un accueil des plus chaleureux, inutile de vous dire que j’ai eu besoin d’un temps d’adaptation non seulement à la vie à Paris, mais aussi à ce nouveau travail. Travail très diversifié, où nous avions à la fois à rédiger les revues militantes, accompagner des équipes dans les diocèses qui nous étaient attribués, conduire une réflexion prospective, le Mouvement étant en pleine évolution, voire en refondation. Ce qui évidement ne faisait pas l’unanimité. La ligne directrice avait été définie par l’Assemblée des Cardinaux et Archevêques, (c’était l’époque où l’on parlait de « mandat ») :« Réadapter les paroisses à leur mission de vie vraiment communautaire. » Je me souviens d’une Campagne d’Année qui avait pour thème : « Evoluer c’est être fidèle »…Tout un programme...qu’il fallait accompagner !

Un autre élément est intervenu qui a beaucoup aidé à mon insertion parisienne. J’habitais un logement de fonction dans le quartier Saint-Sulpice. Et donc, tout naturellement, je tournais mes pas vers la grande église, que je trouvais admirable, qui se dressait sur la place du même nom. Et là j’ai été très vite séduite par la qualité des célébrations, des prédications, par un certain climat où se dégageait un vrai souci apostolique. Les circonstances ont fait qu’un jour j’ai eu la possibilité de rencontrer le curé qui était alors le Père Henri Le Sourd. Lors de notre premier entretien, dont je garde un souvenir très précis, j’ai eu l’intuition qu’il y aurait une suite, même si je savais que ma vie au Secrétariat National n’était pas forcément compatible avec une insertion paroissiale.

Je pressens que vous avez vécu là une rencontre qui vous a marquée…

Ce fut un vrai cadeau du Ciel ! Le Père Le Sourd était très au fait du renouveau paroissial. Ce qu’il m’a proposé était inespéré : « Pourquoi ne pas expérimenter sur la paroisse ces équipes de quartiers que l’ACGF propose dans sa nouvelle démarche apostolique ? » m’a-t-il dit un jour. Déjà le curé et les cinq vicaires avaient en charge chacun un quartier. Dans ce contexte, peu à peu, six équipes ont vu le jour, auxquelles je participais, tout au moins pour le lancement. Les fiches d’éveil et de mise en route que nous élaborions à la Commission Urbaine pouvaient ainsi être expérimentées, critiquées, remaniées avant d’être proposées à l’ensemble du Mouvement. A quelque temps de là le Père Le Sourd m’a associée au démarrage de deux équipes d’ACO, ce qui m’a permis de retrouver avec joie un peu de mes racines. Cette insertion paroissiale était pour moi une source d’équilibre humain et spirituel, et en même temps un apport très efficace pour le travail de la Commission Urbaine au plan national.

Je ne veux pas entrer plus en détail dans ce qui fut pendant ces années une vie apostolique intense. Je veux cependant évoquer le grand événement qu’a été le Concile Vatican II qui est venu amplifier le vent de renouveau qui soufflait sur l’Eglise à cette époque. Dès son ouverture le 11 octobre 1962, une communication plus intense s’est établie avec les évêques de la Commission épiscopale à laquelle l’ACGF appartenait. Après chaque session les échos qu’ils nous rapportaient nous mettaient dans l’euphorie. Quelque chose d’exceptionnel était en train de se produire, et pour la première fois un Concile s’apprêtait à publier un décret sur l’Apostolat des Laïcs…

Dès la 2ème session, notre aumônier national le Père Delaporte faisait un séjour à Rome avec une équipe. J’ai eu la grande joie d’être du voyage pour la dernière session et d’être dans la basilique Saint-Pierre lors de la proclamation du Décret sur l’Apostolat des Laïcs le 18 novembre 1965. Grand moment d’émotion. Inoubliable souvenir aussi que la vision de ce rassemblement des évêques du monde entier occupant l’immense nef de Saint-Pierre, et surtout la participation à l’une des messes du Concile présidée par Paul VI. Dans les années qui ont suivi le Concile les textes conciliaires ont été travaillés à tous les niveaux de la vie du Mouvement .

Vous êtes restée combien d’années à l’ACGF ?

Douze ans. Et les dernières années qui ont précédé mon départ, j’ai fait pendant trois ans une formation en cours du soir au Centre de Perfectionnement des Journalistes de la rue du Louvre. En réfléchissant avec des amis qui me connaissaient bien, c’était l’orientation la plus logique.

 

Et vous êtes allée frapper à la porte de Bayard ?

Pas directement. Dans le cadre de mes responsabilités à l’ACGF, je participais à une Commission que le Centre National de Pastorale Liturgique avait mise en place après le Concile et qui réunissait des délégués des différents Mouvements Apostoliques. Je retrouvais là Robert Baguet qui y était au titre de La Vie Nouvelle, mais il travaillait aussi à Bayard-Presse. Une réelle complicité s’était établie entre nous, je me retrouvais bien dans ces interventions et réciproquement. Ces réunions avaient lieu à Neuilly, et un certain soir de mai 1967, Robert me raccompagne au métro. Tout en continuant nos échanges, je lui fais part de mon intention de quitter l’ACGF, et de ma recherche de travail dans le monde de la presse.. Il me dit spontanément : « Nous avons des projets à Bayard-Presse qui pourraient vous intéresser. »

Quelques semaines plus tard, il me téléphone pour m’inviter à venir rencontrer Roger Lavialle, que je connaissais déjà, car il était très lié à Melle du Rostu et était intervenu plusieurs fois dans le cadre de nos Rencontres Nationales. Je me rends donc à ce rendez-vous auquel participait également Robert Baguet. Roger Lavialle me fait part du projet qu’il souhaitait voir aboutir d’un magazine pour les retraités. Il y avait déjà beaucoup réfléchi et avait une vision très claire de l’originalité de ce magazine. Je l’écoutais avec beaucoup d’intérêt, et au fur et à mesure qu’il parlait je me disais intérieurement que ça ne me déplairait pas de travailler dans un tel journal. Quelle n’est pas mon émotion de l’entendre me dire, en fin d’entretien : « Nous souhaiterions que vous conduisiez la réalisation de ce projet et en soyez la rédactrice en chef, Robert Baguet en sera le directeur. » Même si je n’ai pas sourcillée, je vous avoue que la terre a un peu tremblée sous mes pieds. Après en avoir parlé à quelques amis sûrs, je donnais mon accord, et le 1er juillet 1967 je signais mon contrat de travail et débutais à Bayard-Presse le 1er septembre suivant.

Vous voilà rédactrice en chef d’un magazine qui n’existe pas…pas banal !…Même si le projet était clairement défini, il fallait le structurer et rejoindre un public qui n’avait pas encore conscience de lui-même. Comment tout cela s’est-il concrétisé ?

Depuis plusieurs mois, Roger Lavialle et Robert Baguet avaient lancé, dans le réseau des diffuseurs de presse de cette époque, en direction des paroisses, un questionnaire visant à inventorier la vie des plus de cinquante ans. Quand je suis arrivée, mon premier travail a été de dépouiller ce très gros dossier des réponses pour essayer d’en dégager des convergences en vue de trouver des lignes directrices pouvant se traduire par une charte rédactionnelle. Très vite quatre thèmes se sont imposés et sont devenus par la suite les quatre « piliers » autour desquels le journal se construisait mois après mois. Ces quatre thèmes étaient : la santé, les droits, les relations (famille, voisinage, associations) et l’occupation du temps (activités, loisirs, bricolage etc.)

Et vous avez engagé une équipe de journalistes pour traduire par des articles cette prise de conscience des attentes de vos lecteurs potentiels ?

Pas vraiment ! Nous avons commencé par mettre en commun nos carnets d’adresses !…Car il y avait un impératif incontournable, celui d’un budget de lancement réduit à sa plus simple expression. Il fallait faire avec…J’avais une collaboratrice unique, Annie Poumier, devenue quelques années plus tard Mme Poujol, qui me secondait en tout. Elle a d’ailleurs elle-même raconté dans un précédent numéro de Chapô nos débuts quelque peu fantaisistes…Elle était partie prenante du projet, et nous formions un tandem assez réussi. Jusqu’au bout elle a accompagné mon travail avec compétence et amitié.

Comme nous n’avions pas les moyens d’engager des journalistes, il fallait donc rechercher des pigistes. Notre objectif étant de faire un journal de « services », nous nous sommes tournés vers des spécialistes: médecin, psychologue, juriste, notaire etc. La contrainte, pour eux, était d’accepter que je fasse des modifications dans leur texte si je le jugeais nécessaire pour en faciliter la lecture. En effet le risque était qu’un langage de spécialistes, qui par ailleurs donnait beaucoup de rigueur au contenu des articles, ne soit pas assez proche des lecteurs. J’étais donc très attentive au style des articles. C’est là qu’intervenait Jeanne Calvez, « Melle Jeanne » pour les intimes… Elle était correctrice à la composition, et Roger Lavialle m’avait conseillé de lui faire relire les articles, car elle était imprenable tant au plan du français, de l’orthographe que de la compréhension du texte. Et Melle Jeanne nous rapportait nos articles avec des petites croix dans la marge quand elle n’avait pas compris... « Les petites croix » de Melle Jeanne étaient célèbres dans notre rédaction.

Un autre élément est intervenu qui retardait encore la possibilité d’étoffer l’équipe. Comme nous n’avions aucune possibilité de comparaison sur le plan rédactionnel puisque nous étions le premier journal du genre, Roger Lavialle avait souhaité que nous sortions très vite un numéro 0 vendu, et que nous nous donnions plusieurs mois pour en mesurer l’impact avant de prendre notre forme définitive et notre rythme mensuel. Nous avons donc travaillé d’arrache pied à ce premier numéro qui est sorti en avril 1968, tiré à 100.000 exemplaires. Dans ce numéro nous avions mis un questionnaire pour demander l’avis des premiers lecteurs afin de nous permettre d’ajuster notre grille rédactionnelle. Je vous ai dit : avril 1968. Nous étions à la veille de « Mai 68 »  avec les bouleversements que vous connaissez. La précaution prise par Roger Lavialle de reporter à septembre le lancement a sans doute sauvé le journal. S’il avait été en avril, Notre Temps aurait disparu dans la tourmente avant même d’avoir existé…

Comment avez-vous choisi le titre ?

C’est Roger Lavialle qui l’a trouvé : « NOTRE TEMPS », avec, disait-il, une double pente : notre temps d’aujourd’hui, et notre temps passé. Et d’ailleurs le titre a aussi permis d’ouvrir des rubriques, en particulier celle de Jean Nohain : « Portrait de notre temps », et une série qui explorait les grandes découvertes et innovations : « Ceux de notre temps qui ont fait le siècle. » La grande intuition de Roger Lavialle et de Robert Baguet, que je partageais avec enthousiasme, c’était de redonner leur dignité et leur fierté à toute une couche de la population à qui on demandait seulement d’être sagement spectateurs de la vie des autres. Aujourd’hui les retraités ont pignon sur rue, mais en 1967, ils étaient des « vieux ». Il y avait « La journée des vieux » où on faisait la quête sur la voie publique au même titre que la quête pour les lépreux. Nous avons tout fait pour contribuer à inverser la tendance au plan humain, social, associatif, politique, et je crois que nous y avons réussi. Au plan ecclésial, la Vie Montante, fondée par M. D’Humières quelques années auparavant, avait la même perspective : redonner leur place aux personnes âgées dans les paroisses et dans l’Eglise.

C’était un projet très porteur mais exigeant…D’autant plus que vous aviez une équipe vraiment réduite. Comment vous répartissiez-vous les tâches et quelles étaient vos priorités ?

Nous avions essentiellement deux grandes priorités que nous nous partagions admirablement avec Robert Baguet, notre tandem étant très complémentaire, et la confiance réciproque totale : soigner le contenu d’un journal spécifique pour un public très ciblé, et lui faire sa place dans le monde de la presse et dans l’opinion publique.

Autrans. Émission en direct sur France Inter (on y voit J.-P. Elkabach au centre et G. Lacorre à sa droite). 

Autrans. Émission en direct sur France Inter (on y voit J.-P. Elkabach au centre et G. Lacorre à sa droite).

 

Robert Baguet avait en charge tout ce secteur des relations publiques. Il avait un vrai charisme pour réussir dans ce domaine, et il le fit admirablement auprès des Caisses de retraite, des associations de retraités, auprès de la radio, de la télévision, des hommes politiques. En ce qui me concerne il s’agissait de trouver les meilleurs collaborateurs pour réussir un journal qui soit vraiment un journal de « services » et perçu comme tel par les lecteurs.. Par Notre Temps, nous voulions leur apporter un « plus » très ciblé par rapport à leur vie de retraité. Et c’est autour de nos quatre « piliers » que je vous ai déjà cités que se bâtissaient les sommaires. Ce qui me demandait de prendre beaucoup de contacts, d’être au fait de tout ce qui se passait concernant les retraités, de passer beaucoup de temps avec les collaborateurs pour qu’ils entrent dans notre projet, y compris par le vocabulaire, car il y avait des mots interdits. Par exemple nous ne parlions jamais des « vieux. »

Notre commune préoccupation était aussi la connaissance et la rencontre de nos lecteurs. Le courrier a très vite été un apport irremplaçable. Au début je lisais toutes les lettres et répondais moi-même. J’y découvrais des besoins très concrets, des témoignages de vie, des difficultés de toutes sortes à assumer. Nous recevions ainsi de nos lecteurs l’écho vivant de ce dont Notre Temps était porteur. Assez vite nous avons dû créer un service courrier qu’ont assumé Marguerite Géry et Joseph Crozon, ils ont su en faire un véritable service social.

Autre lieu exceptionnel de connaissance de nos lecteurs : « Les Rencontres d’Autrans ». La rédaction au grand complet, avec tous ses collaborateurs, débarquait au Village Olympique d’Autrans en Vercors pour une session-vacances, avec une centaine de lecteurs. Un programme très élaboré faisait alterner des conférences sur les différents sujets concernant la retraite, et des ateliers « spécialisés » autour des différentes rubriques du journal. Nous invitions également des personnalités du monde politique, associatif, des responsables de Caisses de retraite. Nous avons même eu une émission en directe sur France Inter animée par Jean-Pierre Elkabach. Le séjour se terminait par un gala offert par Jean Nohain et sa troupe. Et nous repartions avec de la joie plein le cœur pour ces moments de convivialité vécus avec des lecteurs devenus des amis, et une mine de sujets à explorer pour de prochains articles… Il y a eu ensuite les croisières Notre Temps. C’était un autre style, mais toujours des moments de vie commune qui enrichissaient notre projet et élargissaient notre réseau de relation.

Peu à peu notre équipe rédactionnelle s’était étoffée. L’arrivée de René Poujol lui a donné une autre dimension. Notre maquettiste René Gabet conduisait son travail en maître. Marie-Madeleine de Verchères démarchait avec succès auprès des Caisses de retraite pour proposer Notre Temps comme un service pour leurs adhérents. Notre Temps avais trouvé sa vitesse de croisière.

Etait-il distribué en kiosques ?

J’ai une belle histoire à vous raconter, peut-être unique dans les annales de la presse. Evidemment, étant donné notre budget réduit, il n’était pas question que nous puissions investir pour la vente en kiosques, malgré notre grand désir d’être vraiment sur la place publique…Roger Lavialle avait, parmi ses relations, le directeur d’une grande maison de presse, Monsieur Winkler. Au cours d’un déjeuner, la conversation s’engagea sur Notre Temps, et M.Winkler était tout à fait intéressé par notre journal, il regrettait même de ne pas l’avoir fait lui-même. A tel point qu’il se demandait ce qu’il pouvait faire pour nous aider. A quelque temps de là il proposait à Roger Lavialle d’acheter un certain nombre d’exemplaires de Notre Temps pour les mettre en kiosques, lui-même ayant un vaste réseau de distribution de ses nombreuses publications. En contrepartie, je devais chaque mois aller lui présenter le sommaire du numéro en cours, et je devais publier dans chaque numéro une nouvelle provenant de ses rédactions, que je choisissais moi-même parmi une sélection faites par ses services. Je garde un inoubliable souvenir de ces rencontres avec M.Winkler qui exprimait à chaque fois sa grande satisfaction devant la présentation que je lui faisais du prochain numéro. Ceci n’a duré que quelques mois, pour des raisons budgétaires l’expérience a été interrompue, mais nous étions introduits dans le circuit de la vente en kiosques et nous y sommes restés…

A cette époque Bayard-Presse éditait surtout des journaux à caractère confessionnel, comment se situait Notre Temps dans cet ensemble, car, si j’ai bien compris, vous ne traitiez pas de sujets religieux ?

Vous mettez le doigt sur le sujet qui fâche…Dès le départ le projet visait un public plus large que celui des paroisses. Nous avions clairement défini les valeurs dont nous étions porteurs qui équivalaient pour nous à une dimension implicite du religieux. Mais ce qui était clair pour nous ne l’était pas pour tout le monde, et il a fallu batailler dur pour garder notre perspective, à l’intérieur de la maison comme à l’extérieur d’ailleurs, aussi bien de la part de prêtres que de laïcs… J’avais la chance d’avoir une longue expérience d’Action Catholique, j’ai eu l’idée de rédiger une « Feuille de réflexion chrétienne » à partir de chaque numéro. En regard de certains articles je mettais des textes d’évangile correspondants, des textes du Concile, des questions pour provoquer une réflexion chrétienne, et chaque fois que nous recevions des protestations visant notre « neutralité religieuse », je répondais en envoyant ce feuillet. Peu à peu il a fait tache d’huile, et certains groupes de la Vie Montante ou des paroisses nous le réclamaient pour animer leurs réunions. L’abonnement était gratuit. Et quand je suis partie ce feuillet tirait chaque mois à 5000 exemplaires… Le pari était gagné et en plus nous avions fait évoluer des mentalités…

Pour les vingt ans de Notre Temps, à Montrouge.

Pour les vingt ans de Notre Temps, à Montrouge.

 

Je crois que je vous ai partagé l’essentiel de mes 14 années à Bayard. Encore un fait cependant qui sera la cerise sur le gâteau: grâce au travail acharné de tous, journalistes, promotion, relation publique, j’ai pu signer un « bon à tirer » d’un million d’exemplaires pour le numéro de Janvier 1981. Ce fut quand même une grande satisfaction pour tous…

Comment fait-on pour partir à la retraite après un tel challenge ?

Comme tout le monde, en quittant…en se disant que demain est un autre jour et en essayant de se convaincre, comme le dit si bien Chapô « qu’il y a une vie après Bayard ». Se convaincre aussi que le fil rouge qui a tracé la route depuis tant d’années ne va pas se rompre en quittant la rue François 1er !

J’avais cependant prévu de m’inscrire comme auditrice libre au cours de christologie du Père Joseph Doré à l’Institut Catholique. Ce fut une bonne transition. J’ai trouvé là des fondements solides pour restructurer aussi bien ma vie de foi que ma vie humaine. J’étais aussi très heureuse de me retrouver au milieu d’un public d’étudiants jeunes et enthousiastes. J’avais changé d’univers. J’étais à même d’examiner les propositions qui commençaient à m’arriver, car je n’envisageais pas de poursuivre une formation longue à la Catho, j’avais envie de retrouver le terrain et un public.

Et vous les avez retrouvés ?

Le premier qui m’a contacté dès qu’il a su que j’étais à la retraite, c’est mon curé, le Père de Larminat. Il voulait lancer des groupes de Carême dans les quartiers et m’a demandé de faire partie de l’équipe qui accompagnerait cette mise en route. Ce fut pour moi une bonne occasion de me réinsérer dans la paroisse et le quartier que j’avais quelque peu négligés pendant mes années de vie professionnelle. J’ai accueilli un groupe chez moi, ce qui m’a permis de renouer de vraies relations qui se sont continuées dans la vie quotidienne.

Une autre proposition m’a été faites. J’avais gardé des relations très fraternelles avec le Père Delaporte qui avait été mon Aumônier national à l’ACGF et qui était devenu Archevêque de Cambrai. Il souhaitait faire évoluer la forme vieillotte des bulletins paroissiaux dans son diocèse, et m’a associée à la réflexion d’une petite équipe qui portait le projet. Nous nous rendions compte qu’il fallait passer de l’amateurisme à un certain professionnalisme. Et l’équipe m’a demandé d’initier aux règles du journalisme un groupe d’une vingtaine de personnes qui deviendraient les équipes de rédaction dans les différents secteurs. J’ai donc ressorti mes cours du CPJ et un parcours s’est mis en place. Comme on ne fait pas un journal seulement avec de la technique et des idées, mais avec de la vie, parallèlement à ce temps de formation, nous avons mené un éveil dans les différents arrondissements pour que chaque petite équipe de rédaction puisse avoir ses « correspondants » au plus près de la vie des gens et des événements dans les quartiers. De plus nous préparions ainsi ceux qui deviendraient les diffuseurs du journal dans leur voisinage.

Peu à peu nous avons construit une grille rédactionnelle. Et les premiers articles sont arrivés. A ce moment là j’ai impliqué dans le projet mon maquettiste de Notre Temps, René Gabet qui était aussi à la retraite, et qui a donné sa forme à un nouveau journal et appris à un petit groupe à faire une maquette. « Camera », c’était le nouveau titre, vient de fêter ses 20 ans et depuis plusieurs années c’est Bayard qui en assure la fabrication…Et pour moi ce fut une belle aventure où pendant 5 ans j’ai passé une semaine par mois à Cambrai.

Vous aviez raison de dire que le fil rouge ne s’était pas rompu en quittant Bayard.

Mais ce n’est pas tout. Le Père Delaporte, qui avait de la suite dans les idées, avait aussi en charge, comme évêque, le Service « Incroyances et Foi » qui s’était créé après le Concile. C’était le Père Jacques Sommet, jésuite qui en était le Secrétaire général. Le service éditait une revue trimestrielle et cherchait quelqu’un pour la prendre en charge. Le Père Delaporte m’a fait rencontrer le Père Sommet, et je me suis retrouvée dans un tout autre contexte qui m’a plongée dans un autre aspect de la vie de l’Eglise. Il y avait là, avec le Père Sommet, le Père Pierre Tripier, sulpicien, ô combien original et d’une grande cordialité, un jeune jésuite, Jean-Marie Glé plein d’humour et qui aimait pratiquer « l’apostolat de la fourchette ». Non seulement je participais aux comités de rédaction, mais ils m’associaient à leur réflexion, m’invitaient aux sessions. J’assurais la relecture des articles, la mise en page et la fabrication de la revue. Je suis restée là plusieurs années, jusqu’au départ du Père Sommet et au changement de l’équipe.

Avec l'abbesse clarisse de Poligny, dans le Jura.

Avec l'abbesse clarisse de Poligny, dans le Jura. 

 

Mais ma plus belle aventure est celle que j’ai vécue pendant 20 ans avec les religieuses… Quand j’étais à Notre Temps, j’avais plusieurs fois reçu la visite de responsables de Congrégations qui venaient me parler du vieillissement de leurs sœurs. Elles venaient me demander si je pouvais les aider. Difficile d’en rajouter avec le rythme de travail que j’avais. Quand elles ont su que j’étais à la retraite, elles se sont empressées de venir sonner à ma porte…Les premières qui m’ont contactée sont les sœurs de la Sagesse de Saint Laurent sur Sèvre en Vendée. Elles venaient de constituer une « Commission sœurs aînées » pour leur Province et me demandaient de participer à leur réflexion et à chercher avec elles comment aider leurs sœurs à mieux assumer leur vieillissement. Nous avons préparé des sessions à plusieurs niveaux : pour celles qui allaient prendre leur retraite et qui avaient peur du vide, pour celles plus âgées et très nombreuses qui se croyaient devenues inutiles, et pour les plus jeunes qui étaient au service des très âgées et qui avaient du mal à gérer leur vie personnelle et leur service dans un climat souvent anxiogène. Pour ces dernières nous avions intitulé la session : « Vivre avec sans vivre comme. »

Le bouche à oreille fonctionnant à merveille entre les Congrégations, j’ai été très sollicitée. J’ai découvert des femmes exceptionnelles, chez qui le Concile avait apporté un grand souffle de renouveau, mais qui avaient besoin d’être aidées dans leur réflexion et la mise en œuvre de nouvelles manières de vivre leur mission. Je me suis vraiment mise au service des responsables pour réfléchir à leurs besoins et bâtir des sessions sur mesure. J’ai beaucoup lu et travaillé sur tout ce qui concernait la vie religieuse et le vivre ensemble communautaire.

En 1987 j’ai été sollicitée par les sœurs de La Sainte Union pour participer à leur Chapitre général à Rome. Elles sortaient de longs débats, souvent difficiles, suscités par la révision de leurs Constitutions demandée par le Concile. Elles éprouvaient le besoin d’une réflexion plus large et plus gratuite. Elles avaient choisi le thème « Monde. Femme. Eglise. » et elles souhaitaient que ce soit une laïc qui anime ce Chapitre. J’ai accepté ce nouveau chalenge. Inutile de vous dire que j’ai beaucoup travaillé. Pendant un mois à Rome j’ai vécu une expérience d’une richesse assez exceptionnelle, avec des femmes de plusieurs continents, dans un climat de prière, de fraternité chaleureuse, de réflexion à la fois sérieuse et détendue, avec une capacité d’accueil qui m’émerveillait. Avec des soirées de fête où chaque pays apportait sa culture et son originalité. Inoubliables souvenirs. Au retour, l’équipe provinciale m’a demandé de reprendre, pour les sœurs de France, les thèmes de réflexion du Chapitre. Cinq ans après j’ai été invitée comme « amie » à leur nouveau Chapitre en Angleterre.

Je veux aussi vous raconter comment j’ai rencontré les Clarisses, Par la responsable provinciale des sœurs du Très Saint Sauveur avec lesquelles je collaborais depuis plusieurs années, l’Abbesse de Tinqueux, près de Reims, avait su ce que je faisais avec elles et avait souhaité me rencontrer. Et un matin je me retrouvais dans le parloir du monastère, un peu paniquée, me disant : « Qu’est-ce que tu es venue faire là ! ». Je n’avais qu’une envie, c’était de repartir par le prochain train. Le monde des contemplatives m’était totalement inconnu. Autour d’une tasse de café et de petits biscuits une étonnante complicité s’est établie, un échange profond s’est engagé, je suis restée deux jours, et je suis repartie avec le projet d’un parcours sur plusieurs mois.

L’année suivante, l’Abbesse, sœur Elisabeth, m’a fait inviter pour une intervention lors de l’Assemblée francophone des Abbesses Clarisses à Francheville près de Lyon, et de nouvelles portes se sont ouvertes. Je me suis retrouvée en grande complicité avec ces femmes. Je leur ai fait des dizaines de sessions. Elles m’ont beaucoup apporté. Je garde avec elles, encore aujourd’hui, des liens d’amitié d’une qualité rare.

Pendant tout ce temps consacré aux religieuses vous aviez quelque peu délaissé votre paroisse ?

Pas vraiment, mon curé, le Père Roumanet, m’ayant demandé de participer à l’accueil, je pouvais choisir les jours et heures qui correspondaient à mon temps disponible. Car l’accueil, à Saint-Sulpice, a une très grande importance, nous pouvons en effet recevoir chaque jour entre 500 et 1000 visiteurs. Quand a surgi le phénomène Da Vinci Code, il a fallu faire face à des foules beaucoup plus importantes. Notre curé a très bien géré et su transformer ce qui aurait pu être un envahissement insupportable en un grand moment d’explications. Les gens arrivaient avec la certitude qu’ils étaient sur les lieux historiques des événements décrits dans le roman. Nous devions désamorcer patiemment tant de crédulité.

Je rendais aussi des services à mon curé grâce à l’ordinateur que je pouvais gérer chez moi à ma convenance. Mais il faut que je vous raconte comment j’ai eu mon premier ordinateur. Cette belle histoire remonte maintenant à un douzaine d’années. Le Père Roumanet avait à plusieurs reprises essayé de me convaincre de m’initier à l’informatique. Je faisais la sourde oreille. Et un jour je suis sortie de son bureau avec un ordinateur qu’il m’avait mis dans les bras en me disant : « Vous pourrez au moins essayer ! » Je n’ai plus résisté, je suis allée prendre des cours à la mairie, et j’ai beaucoup investi pour devenir performante. Aujourd’hui j’en mesure tout l’intérêt aussi bien pour le traitement de texte que pour l’accès à Internet. J’ai pu faire beaucoup de travaux dont deux livrets d’une centaine de pages pour accompagner les pèlerinages de la paroisse en Terre Sainte. Pour mes 80 ans je me suis offert un bel ordinateur tout neuf ! Et à 80 ans j’ai également arrêté les sessions et investi davantage dans la paroisse.

Mais en juin dernier j’ai eu un très grave accident de santé qui m’a tenu six mois en marge de toute activité et de toute vie…Je me remets très bien de cette épreuve. J’en sors changée. Un passage s’est opéré en moi. Je prends conscience qu’il y a des étapes à respecter, et que j’ai franchi une étape. Je découvre peu à peu qu’il y a une activité intérieure qui peut aussi avoir une grande utilité. Et j’entre très sereinement dans ce temps de la gratuité. La Parole de Dieu dont l’Action Catholique m’a fait découvrir l’importance, il faut peut-être maintenant que je prenne le temps de la ruminer. Ce que je ne peux plus faire extérieurement je peux le porter intérieurement dans la prière. J’ai toujours aimé lire, je suis toujours à l’affût du dernier livre qui peut m’intéresser, je peux prendre plus de temps pour lire, élargir encore l’espace de ma tente…. Par Internet c’est le monde entier qui vient à moi. C’est une autre vie que je dois inventer…J’en suis seulement au tout début…J’aime méditer cette parole du Père Delaporte qui m’accompagne depuis longtemps ; nous commentant l’évangile des noces de Cana, à la fin il nous a dit : « Dieu donne toujours le bon vin en dernier…le meilleur reste à vivre… »

Propos recueillis par Odile Douroux